Intégrer la gouvernance partagée dans votre entreprise : principes, outils et retours d’expérience

Intégrer la gouvernance partagée dans votre entreprise : principes, outils et retours d’expérience

Comprendre la gouvernance partagée : Définition et fondements

La gouvernance partagée est un modèle organisationnel innovant qui repose sur la distribution du pouvoir de décision au sein des équipes, plutôt qu’une centralisation hiérarchique classique. Elle s’appuie sur des principes de transparence, d’autonomie, de responsabilité collective et de prise de décision distribuée. Popularisée par des méthodes comme l’Holacracy, la sociocratie ou encore l’approche Opale proposée par Frédéric Laloux, cette forme de gouvernance vise à renforcer l’engagement des collaborateurs, accélérer l’innovation et accroître l’agilité des structures.

Contrairement aux modèles pyramidaux, la gouvernance partagée repose sur des cercles de rôles, où chaque membre de l’organisation peut avoir plusieurs rôles clairement définis, avec des responsabilités précises et des redevabilités explicites.

Étapes concrètes pour mettre en œuvre une gouvernance partagée

Migrer vers une gouvernance partagée nécessite une transformation progressive : culturelle, structurelle et opérationnelle. Voici les étapes clés pour une implémentation réussie :

  • 1. Réaliser un diagnostic organisationnel : Identifiez les besoins de changement avec un audit interne ou grâce à des entretiens avec les parties prenantes. Objectif : comprendre les blocages actuels liés à la gouvernance centralisée.
  • 2. Choisir un cadre de gouvernance adapté : Par exemple, Holacracy offre un système formalisé avec une Constitution, tandis que la sociocratie mise davantage sur le consensus et les cercles délibératifs. Évaluez les ressources internes pour décider du niveau de formalisme souhaité.
  • 3. Former les équipes : Utilisez des formations certifiantes, comme celles proposées par l’institut iGi, ou via des spécialistes comme ENLIVENING ou iGi Partners. Ces formations incluent des mises en situation, des jeux de rôle et des sessions pratiques.
  • 4. Mettre en place des rôles et cercles : Redéfinissez l’organisation non plus par services mais par “cercles” opérationnels et de gouvernance, chacun responsable d’un domaine précis (par exemple : marketing, logistique, produits).
  • 5. Instaurer des réunions de gouvernance et de triage : Ces réunions permettent d’ajuster les rôles, résoudre les tensions et aligner les activités avec la raison d’être de chaque cercle.
  • 6. Accompagner le changement : La transformation nécessite un accompagnement au changement soutenu. Identifiez des facilitateurs internes et mettez en place un coaching organisationnel.

Outils et technologies pour soutenir la gouvernance partagée

Pour mettre en œuvre efficacement une gouvernance partagée, plusieurs outils numériques et méthodologies facilitent la structuration de cette nouvelle manière de travailler :

  • GlassFrog : Plateforme dédiée à Holacracy qui permet de visualiser les rôles, les politiques en vigueur, et les relations entre les cercles. Utilisée notamment par Zappos aux États-Unis.
  • Loomio : Outil collaboratif de prise de décision en ligne, très utilisé dans les collectifs et les organisations distribuées.
  • Tactical Meeting App (TMA) : Utile pour structurer les réunions de triage de manière efficace selon le cadre Holacracy.
  • Notion ou Confluence : Pour centraliser la documentation liée aux rôles, projets, décisions collectives et apprentissages organisationnels.
  • Miro ou Klaxoon : Pour animer des ateliers collaboratifs (revue de cercle, reconfiguration des rôles) même à distance.

Études de cas : entreprises ayant mis en œuvre la gouvernance partagée

Plusieurs entreprises ont déjà fait le choix de la gouvernance partagée. Voici quelques cas inspirants et les résultats obtenus :

FAVI (France, industrie métallurgique) : Cette PME a mis en œuvre un modèle de gouvernance basé sur l’autonomie des équipes depuis les années 1990. Chaque équipe de production est responsable de son budget, de ses embauches et de ses décisions opérationnelles. Résultat : un taux de satisfaction client supérieur à 95 % et une implication des salariés remarquable, avec très faible turnover.

Zappos (États-Unis, e-commerce) : L’entreprise américaine a adopté Holacracy en 2013. Malgré un démarrage difficile (14% des salariés ont quitté l’entreprise), la structure a gagné en agilité, chaque employé pouvant contribuer à différents rôles. Zappos a pu accélérer l’innovation produit et améliorer la fluidité de la communication transversale.

BioLogic (Belgique, coopérative bio) : Cette coopérative a adopté la sociocratie de manière organique. Elle organise des “cercles” ouverts à ses 30 membres pour toute prise de décision stratégique. Bilan : une réduction significative des conflits internes et une meilleure compréhension interpersonnelle entre équipes commerciales, agricoles et administratives.

Decathlon IT (France) : Certaines équipes informatiques de Decathlon ont adopté l’auto-organisation par cercles, en s’inspirant de Teal et de Sociocratie. L’agilité, combinée à une gouvernance distribuée, a permis d’améliorer significativement les délais de livraison des projets logiciels internes.

Bénéfices concrets et leviers d’adoption

Les résultats observés dans les organisations ayant adopté une gouvernance partagée incluent :

  • Autonomie accrue des équipes : Les décisions sont prises au bon niveau, accélérant la réactivité et l’innovation.
  • Transparence organisationnelle : Chaque rôle est défini publiquement, évitant les incompréhensions sur les responsabilités.
  • Réduction du nombre de réunions : Les réunions sont mieux structurées avec des rôles clairs (facilitateur, secrétaire, time keeper), réduisant les temps morts.
  • Implication renforcée des collaborateurs : Les salariés se sentent plus responsables et engagés dans la mission collective.

Pour favoriser l’adoption de ces pratiques, il est recommandé de :

  • Lancer des expérimentations limitées sur un ou deux cercles pilotes avant de généraliser à toute l’organisation.
  • Partager régulièrement des retours et apprentissages entre équipes.
  • S’assurer de l’alignement du top management, indispensable pour soutenir les évolutions culturelles profondes.
  • Instaurer une posture d’apprentissage permanente : la gouvernance partagée n’est pas un modèle statique, elle évolue avec les besoins de l’organisation.

Conseils pratiques pour réussir la transformation

Voici quelques recommandations basées sur l’expérience d’entreprises et de consultants spécialisés :

  • Éviter de copier-coller un modèle existant : Chaque organisation est unique ; adaptez les principes de la gouvernance partagée à votre culture et contexte.
  • Impliquer les salariés dès le départ : Les co-créateurs du changement sont aussi les garants de sa durabilité.
  • Travailler sur la posture managériale : Le rôle de manager évolue vers celui de coach, facilitateur ou garant du processus.
  • Mesurer l’impact : Mettez en place des indicateurs pour suivre l’efficacité des décisions, le climat social, et la satisfaction des parties prenantes.

L’intégration de la gouvernance partagée est bien plus qu’un simple changement de structure : c’est une reconfiguration profonde de la dynamique collective. En procédant par étapes mesurées et en s’appuyant sur des outils éprouvés, les entreprises peuvent progressivement transformer leur culture vers plus de confiance, de collaboration et de performance durable.