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Mettre en place un budget participatif en entreprise pour financer des projets à impact social et environnemental

Mettre en place un budget participatif en entreprise pour financer des projets à impact social et environnemental

Mettre en place un budget participatif en entreprise pour financer des projets à impact social et environnemental

Mettre en place un budget participatif en entreprise permet de financer des projets à impact social et environnemental proposés par les collaborateurs, tout en renforçant l’engagement interne. Inspiré des démarches citoyennes menées par de nombreuses villes (Paris, Lisbonne, Madrid…), ce mécanisme se déploie désormais dans des organisations privées, notamment dans des groupes internationaux et des ETI soucieuses de crédibiliser leur stratégie RSE.

Ce format d’article propose une démarche opérationnelle, des outils concrets et des retours d’expérience adaptés à des responsables RSE, DRH, directions de l’innovation ou directions générales souhaitant lancer un tel dispositif.

Intégrer le budget participatif à la stratégie RSE et business

Avant de travailler le “comment”, il est essentiel de clarifier le “pourquoi”. Un budget participatif est d’autant plus efficace qu’il est relié à des objectifs déjà existants :

  • Réduction de l’empreinte carbone (scopes 1, 2 et 3)
  • Amélioration de la qualité de vie au travail et de l’engagement collaborateurs
  • Renforcement de l’ancrage territorial
  • Innovation sociale (produits ou services à impact)
  • Dans plusieurs groupes internationaux, le budget participatif interne est hébergé dans la fonction RSE mais co-piloté avec les RH et parfois la direction de l’innovation. Ce co-pilotage évite que le dispositif soit perçu comme purement “symbolique” ou “communicationnel” et facilite l’intégration des projets retenus dans les processus métier (achats, immobilier, IT, etc.).

    Exemple réel : le Green Fund d’Adobe

    Un exemple documenté est celui d’Adobe, qui a mis en place un fonds interne baptisé souvent “Green Fund” pour financer des projets portés par les collaborateurs afin de réduire l’empreinte environnementale de l’entreprise et de ses sites.

    Fonctionnement clé (d’après les retours publiés par l’entreprise et analysés par plusieurs organismes spécialisés en RSE) :

  • Un budget annuel centralisé est alloué au niveau global.
  • Des équipes locales (dans les bureaux) peuvent soumettre des projets : amélioration de l’efficacité énergétique, compostage, réduction des déchets, installation de parkings vélos, etc.
  • Les projets sont évalués sur des critères transparents : impact environnemental mesurable, coût, faisabilité, potentiel de réplication sur d’autres sites.
  • Les collaborateurs participent au choix via des comités mixtes (RSE + salariés) et parfois des votes internes pour départager les projets.
  • Les résultats (économies d’énergie, diminution des déchets, satisfaction des collaborateurs) sont suivis et partagés en interne.
  • Adobe met en avant des résultats concrets :

  • Réduction mesurable des émissions liées à l’énergie sur plusieurs sites après des travaux financés par ce fonds.
  • Augmentation du taux de participation aux programmes environnementaux internes.
  • Renforcement du sentiment de fierté et de pouvoir d’agir des collaborateurs impliqués.
  • Ce type de dispositif n’est pas strictement appelé “budget participatif” dans tous les cas, mais les mécanismes sont similaires : dotation budgétaire dédiée, appels à projets, évaluation transparente et implication des collaboratrices et collaborateurs dans la sélection.

    Définir le périmètre, le budget et les règles du jeu

    Pour lancer un budget participatif à impact social et environnemental en entreprise, trois paramètres structurants sont à clarifier dès le départ.

    Périmètre des projets éligibles

  • Projets environnementaux internes : réduction des déchets de bureau, mobilité douce, efficacité énergétique, aménagements écoresponsables.
  • Projets sociaux internes : inclusion, accessibilité, prévention santé, égalité femmes-hommes, programmes de mentorat.
  • Projets à impact externe : soutien à des associations partenaires, programmes d’engagement sur le territoire, actions avec des écoles ou universités.
  • Il est utile de publier une “charte d’éligibilité” en quelques pages, accessible sur l’intranet, détaillant clairement ce qui est recevable ou non (par exemple : pas de projets individuels sans bénéfice collectif, pas de projets incompatibles avec le code éthique de l’entreprise, etc.).

    Montant du budget

    Les pratiques observées dans les entreprises qui se sont lancées convergent vers des montants proportionnels à la taille de l’organisation. Quelques repères :

  • Petites structures (moins de 200 personnes) : budget de l’ordre de quelques dizaines de milliers d’euros par an (souvent 0,1 à 0,3 % de la masse salariale).
  • ETI et grandes entreprises : budgets annuels de plusieurs centaines de milliers d’euros, parfois ventilés par site ou par business unit.
  • Une approche fréquente consiste à lancer un pilote avec un budget limité sur un site ou une région, puis à augmenter progressivement les montants et le périmètre si l’adhésion est au rendez-vous.

    Règles du jeu et gouvernance

    Les éléments à définir clairement et à formaliser dans un règlement interne sont :

  • Qui peut proposer un projet ? (tous les collaborateurs, uniquement les CDI, collaborateurs avec un minimum d’ancienneté, etc.).
  • Qui peut voter ? (tous, y compris stagiaires et alternants, ou seulement certaines populations).
  • Mode de décision : vote direct des collaborateurs, comité mixte (RSE, RH, représentants du personnel, directions opérationnelles) ou combinaison des deux.
  • Plafond de financement par projet (par exemple, 5 000, 20 000 ou 50 000 €) pour financer un plus grand nombre d’initiatives.
  • Nombre d’appels à projets par an (un ou deux sont souvent suffisants au début).
  • Structurer le processus de bout en bout

    Un budget participatif efficace suit un cycle récurrent, généralement annuel. Voici une structuration opérationnelle en étapes successives, avec des outils possibles pour chacune.

    Préparation et cadrage

  • Mise en place d’un comité de pilotage (RSE, RH, finance, représentants du personnel).
  • Définition des critères d’évaluation : impact social/environnemental, alignement stratégique, coûts, risques, faisabilité dans un délai donné.
  • Choix des outils : plateforme de consultation, formulaire de dépôt, outils de vote.
  • Outils utilisés dans plusieurs entreprises :

  • Formulaires : Microsoft Forms, Google Forms, Typeform pour le dépôt des projets.
  • Suivi des projets : Airtable, Trello, Asana, Monday.com.
  • Communication interne : Slack, Microsoft Teams, Workplace by Meta, intranet SharePoint.
  • Phase d’idéation et de dépôt des projets

    Cette phase dure en général entre quatre et huit semaines.

  • Organisation de sessions de sensibilisation à l’impact social et environnemental (webinaires, ateliers, micro-formations en ligne).
  • Ouverture de l’appel à projets via un formulaire structuré : description, objectifs, impacts attendus, budget estimé, équipe porteuse.
  • Accompagnement des porteurs de projet par la fonction RSE, l’innovation ou une cellule d’intrapreneuriat.
  • Plusieurs entreprises ayant expérimenté des dispositifs similaires (fonds d’innovation ou fonds RSE participatifs) constatent que le taux et la qualité des propositions augmentent significativement lorsque :

  • Les porteurs sont accompagnés pour chiffrer leur projet (via des gabarits budgétaires simples).
  • Des exemples de projets déjà financés (en interne ou ailleurs) sont partagés pour inspirer.
  • Des temps dédiés (hackathons internes, ateliers d’idéation) sont intégrés sur le temps de travail.
  • Pré-sélection et validation de recevabilité

    Une équipe restreinte (RSE + quelques volontaires formés) vérifie la recevabilité des projets :

  • Conformité aux règles et au périmètre
  • Absence de risque juridique ou de réputation identifié
  • Vérification sommaire du budget et de la faisabilité
  • Les projets jugés recevables sont ensuite résumés sous un format homogène (fiche projet standardisée) pour être soumis au vote.

    Vote des collaborateurs

    Deux grands modèles sont souvent utilisés :

  • Un vote simple : chaque collaborateur dispose d’une voix et la répartit sur un ou plusieurs projets.
  • Un vote par “points” : chaque personne reçoit un nombre de points (par exemple 10) à répartir librement entre les projets, ce qui permet d’exprimer des préférences plus fines.
  • Outils possibles, selon le degré de sophistication recherché :

  • Solutions de sondage internes : Microsoft Forms, Slido, Mentimeter pour un premier niveau simple.
  • Plateformes de participation dédiées (utilisées souvent dans des contextes citoyens, mais transposables en entreprise) : Civocracy, Cap Collectif, Decidim (open source), Loomio.
  • Les entreprises qui communiquent sur ces démarches insistent sur la transparence : publication du taux de participation, des résultats détaillés par projet, des arbitrages éventuels si certains projets sont partiellement financés.

    Mise en œuvre des projets financés

    Une difficulté fréquente observée dans les retours d’expérience est la “perte de dynamique” après le vote : les projets sont sélectionnés mais tardent à être mis en œuvre faute de temps, de ressources ou de sponsor managérial.

    Bonne pratique :

  • Identifier un sponsor métier pour chaque projet (manager, directeur de site, responsable de service).
  • Inscrire les projets retenus dans les plans d’action officiels (plan RSE, plan QVT, plan immobilier, etc.).
  • Mettre en place un suivi trimestriel avec indicateurs simples : budget consommé, jalons atteints, premiers résultats.
  • Fournir un support opérationnel (achats, juridique, IT, immobilier) via une personne “référente” par fonction pour accélérer les décisions.
  • Mesure des impacts et retour d’expérience

    Pour la crédibilité du dispositif, il est essentiel d’objectiver les résultats. Les indicateurs peuvent être :

  • Quantitatifs environnementaux : kWh économisés, tonnes de CO₂ évitées, kilos de déchets réduits, volume de papier non consommé.
  • Quantitatifs sociaux : nombre de bénéficiaires, taux de participation, nombre de personnes en situation de handicap ou éloignées de l’emploi accompagnées, etc.
  • RH et engagement : taux de participation au vote, taux de satisfaction dans les enquêtes internes, score d’engagement ou eNPS.
  • Adobe, par exemple, communique régulièrement sur les gains énergétiques ou de réduction de déchets réalisés grâce aux projets issus de son fonds interne. Ces chiffres sont réutilisés dans les rapports RSE et dans les communications internes, ce qui renforce le sentiment de contribution des équipes.

    Facteurs clés de succès observés sur le terrain

    Les organisations qui ont déployé des mécanismes de financement participatif pour des projets à impact, que ce soit sous le nom de budget participatif, fonds d’innovation sociale ou fonds vert, convergent sur plusieurs leviers déterminants.

    Soutien visible de la direction générale

  • Message clair de la direction sur l’importance du dispositif et son ancrage stratégique.
  • Participation de membres du comité exécutif au lancement, au jury final ou à des événements de mise en valeur des projets.
  • Transparence sur le budget et sur les décisions

  • Annonce du montant global disponible dès le début.
  • Publication des critères d’évaluation, des scores obtenus par les projets, des raisons d’acceptation ou de refus.
  • Explication des cas de “retrait” ou de non-réalisation de projets, pour maintenir la confiance.
  • Accompagnement des porteurs de projets

  • Sessions de formation à la gestion de projet, au pilotage budgétaire, à la mesure d’impact.
  • Mentorat par des collaborateurs expérimentés (finance, achats, gestion de projet).
  • Modèles de documents prêts à l’emploi : budget prévisionnel, plan d’action, tableau de bord simple.
  • Communication régulière et incarnée

  • Interviews de porteurs de projets sur l’intranet, podcasts internes, courtes vidéos.
  • Événements annuels mettant à l’honneur les projets réalisés (type “demo day” ou “journée de l’impact”).
  • Implication des managers de proximité pour encourager la participation pendant le temps de travail.
  • Étapes pratiques pour démarrer dans votre entreprise

    Pour un professionnel qui souhaite passer à l’action, une trajectoire réaliste sur douze à dix-huit mois peut ressembler à ceci :

  • Obtenir un accord de principe de la direction (DG, DRH, direction RSE) sur un pilote limité : un site, une région, une business unit.
  • Définir un budget pilote et un périmètre restreint (par exemple : uniquement des projets environnementaux internes la première année).
  • Constituer un comité de pilotage de taille réduite (cinq à huit personnes) avec au moins un représentant des collaborateurs non cadres.
  • Choisir des outils simples : un formulaire de dépôt (Google Forms ou équivalent), un tableur partagé (Excel / Google Sheets) pour le suivi, et un outil de vote interne.
  • Lancer un premier appel à projets avec un calendrier clair (idéation, dépôt, présélection, vote, mise en œuvre) et un engagement de la direction de publier les résultats.
  • Accompagner fortement deux ou trois premiers projets pour garantir des “victoires rapides” visibles.
  • Évaluer le dispositif au bout de la première année (participation, satisfaction, impacts mesurés) et décider d’un élargissement ou d’ajustements (règles, budget, gouvernance, outils).
  • Ce type d’approche incrémentale, couplée à une capitalisation systématique des retours d’expérience, permet de transformer progressivement un budget participatif pilote en un levier structurant de la stratégie d’impact social et environnemental de l’entreprise.

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